jeudi 24 janvier 2013

La reprise de M-Real : une victoire des salariés, une victoire de la puissance publique mobilisée



Article de Guillaume Bachelay



En 2009, le groupe finlandais M-Real annonçait la fermeture de la papeterie d’Alizay dans l’Eure. Il s’agissait d’un « cas d’école » des dérives du capitalisme actionnarial, car le groupe refusait toute reprise du site – pourtant performant – afin d’éviter qu’un concurrent éventuel lui succède sur la vallée de la Seine et s’impose dans le Nord-Ouest européen. 330 salariés étaient menacés dans leur emploi.
La mobilisation a été à la hauteur de cette annonce d’autant plus incompréhensible que le potentiel du site était incontestable, notamment grâce à une usine leader sur le marché du papier recyclé, le savoir-faire reconnu des salariés, une position géographique stratégique le long de l’axe Seine pour l’acheminement de la matière première, des perspectives de diversification d’activités sur la production d’énergie.
Pendant trois ans, comme Vice-président de la région Haute-Normandie, j’ai été aux côtés de l’intersyndicale. Je me souviens de la première réunion où je me suis rendu dans ces nouvelles fonctions, fin avril 2010, voici presque trois ans, sur le site. Nous avions découvert les conclusions de l’expertise indépendante – que la Région, sollicitée par le Comité d’entreprise, avait co-financée. Que disait ce document ?  Que la production de pâte à papier sur le site d’Alizay était viable et rentable. Que les équipements actuels constituaient une vraie base de consolidation de l’activité en même temps que de diversification énergétique. Relatant cette réunion – la première avant les nombreux rendez-vous de la cellule de reclassement ou du groupe de travail « redynamisation industrielle » à la préfecture de l’Eure, à Évreux -, lors de la séance de la Région en juin 2010, je déclarais : « Autant de raisons de peser  collectivement peser sur les dirigeants de l’entreprise pour que l’activité soit maintenue ou a minima que le site trouve un repreneur ».
Cela a pris deux ans et demi. Il a fallu la détermination des salariés du site : ils n’ont jamais renoncé à rechercher une solution d’avenir, ont mobilisé les élus locaux, puis le nouveau gouvernement. Il a fallu aussi l’engagement des élus du territoire : Jean-Louis Destans pour le Département de l’Eure, François Loncle, le député de la circonscription, Gaëtan Levitre, maire de la commune, Alain Le Vern, président de la région Haute-Normandie, et Nicolas Mayer-Rossignol, désormais en charge de l’économie à ses côtés, mais aussi Richard Jacquet, maire de Pont de l’Arche, Marc-Antoine Jamet, Maire de Val-de-Reuil, et tant d’autres amis si souvent croisés aux assemblées générales ou dans les marches communales. Tous ensemble, avec les forces de la gauche rassemblées, nous avons travaillé sans relâche pour éviter la disparition de cet outil industriel et remettre l’emploi au cœur de tout.
C’était donc un grand moment d’émotion que de nous retrouver, cet après-midi, pour accueillir Arnaud Montebourg, Ministre du redressement productif, afin qu’il préside à la signature de la convention de reprise du site par le Conseil général de l’Eure et la société « Double A ». Grâce à une prise de contrôle « éclair » du Conseil Général de l’Eure – qui a été propriétaire du site « une heure ce matin », comme l’a rappelé son Président -, les repreneurs se partageront des installations qui s’étalent sur 100 hectares : l’entreprise thaïlandaise Double-A reprendra la partie papetière tandis que l’Établissement public foncier de Normandie (EPFN) gérera le reste des terrains pour y développer un port fluvial et attirer d’autres employeurs. Les chaudières déjà existantes pourront fournir de la vapeur en tant qu’outils de production d’ « électricité verte ». Ces efforts ont permis de sauver l’outil industriel et vont permettre le retour de l’emploi à Alizay. Comme l’a indiqué le Ministre, « c’est une victoire contre la fatalité acquise par toute l’équipe de la réindustrialisation – salariés, élus locaux, État-, une victoire du patriotisme ».
Un dernier mot : il y a presque un an, le 15 février 2012, François Hollande était venu dans cette usine. Il avait dit son souhait d’une reprise industrielle. Le candidat est devenu notre Président et celle-ci a eu lieu aujourd’hui même. Ce jour-là, avait été annoncée une volonté, celle de légiférer sur les reprises de sites rentables. Cette initiative est portée par le groupe socialiste à l’Assemblée nationale et j’ai inlassablement plaidé pour sa concrétisation : un texte verra le jour, je l’espère, prochainement et avec d’autres collègues, j’y travaille actuellement. Dans la bataille pour l’industrie et pour l’emploi, nous poursuivons inlassablement notre effort. Constants, persévérants.
 C’est une belle victoire de la puissance publique. Saluons-la comme il se doit.

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